JohnTone Trio

Ça raconte des histoires improbables, tellement que le quotidien n'en croit pas ses oreilles. Des histoires d'odeurs de tabac froid, de fermeture de bar, du balai, mégots et verres cassés, la panossoire et bonsoir. Ou plutôt, bonjour: il est l'heure des premiers croissants dans le matin d'hiver, on dirait la nuit.

C'est la nuit, dans la conduite forcée qui relie les caves du monde à la chambre de bonne, la mansarde du bon dieu, égaré en double file. La tension est perceptible, ça turbine, jusqu'à la rupture de l'élastique en une étincelle, une étoile parmi la galaxie, la lune, l'air glacé murmure une joie de vivre déplacée peut-être, mais... So what? Même le diable se met à croire au salut, car tout vibre, le vent, le bois, les peaux, les crins, les boyaux et dans l'écrin, le groove. Que perle la sueur !

Puis, ça recommence, l'éternel retourne sur le bitume du trottoir mouillé par la pluie, s'y reflètent les publicités de la ville, couleurs primaires, basics instincts, le cliché exige l'imper' et le chapeau, est-ce que le crime a déjà eu lieu ? Est-ce que le flic a déjà reçu son enveloppe? Quant au bankster, il court toujours. Pourtant, au signal bref mais clair de la caisse claire, les moines circonvolutent autour du jardin du cloître, alors que le soleil et l'ombre jouent à s'attraper, à s'effleurer sous l'œil de l'architecte, une petite fossette aux coins des lèvres.

Mais elle, elle trouve que ça lui fait une belle jambe. Il n'est plus question de jeu, d'effleurement, tout ce que ses bras attrapent, c'est le vide, pire que ça, le creux, l'absence et ce trou rongeur ne serait rien sans la brûlure, mais qui donc a bien pu lui foutre un monde pareil! Un monde si fêlé, si mal fini, plein de pièges, cruel, bancal, indifférent, et qui continue, tourne comme si de rien n'était, comme si personne ne remarquait tous ses hoquets, tous ses ratés.

Le cortège relance sa parade, conjure le sort, sacrifie à toutes les déesses, à tous les dieux, en invente quelques dizaines, on ne sait jamais, et puis c'est amusant, c'est divertissant, hé oui, c'est divers, en revers, dévers, à contre-pied, binaire plus un et quelques poussières, l'autre face de l'imperfection, la vie encore, encore elle, tu croyais quand même pas pouvoir y échapper? Allez, viens! Tu reprendras bien encore un verre?

Text d'Igor Milhit, 2016 Fermer Lire plus

En mai 2013 le trio enregistre après quatre mois d'existence un premier opus intitulé logiquement "Opus I". Volontairement enregistré en une seule session à l'Atelier 9 pour garder la fraîcheur et la spontanéité du live. Cet album se veut représentatif de l'esprit du trio.